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La transposition didactique

Ce qui distingue l’homme comme espèce n’est pas seulement sa capacité d’apprendre, mais également celle d’enseigner.

(J. S. Bruner)

La notion de transposition didactique est devenue d’usage courant en sciences de l’éducation et notamment dans les diverses didactiques des disciplines. Emprunté au sociologue Verret (1975), le concept de transposition didactique a été introduit en didactique avec un large succès parce que c’est l’activité qui consiste à transformer un objet de savoir savant en un objet de savoir à enseigner.

On parle de plus en plus d’écart de générations ou de fossé entre les générations, c’est pourquoi la distance entre le savoir savant et le savoir enseigné doit être absolument étudiée car le fonctionnement didactique du savoir est autre que le fonctionnement savant.

À l’avis de Philippe Perrenoud, il y a confusion lorsqu’on laisse entendre que savoirs et pratiques sont des réalités clairement distinctes. Il tente de montrer qu’il n’y a pas de savoirs sans pratiques, ni de pratiques sans savoirs, en proposant une schématisation plus complexe de la chaîne de transposition. Si la compétence renvoie à une action réussie, alors la compréhension du fonctionnement d’une compétence résulte de la mise en relation:

1. D’un côté, les ressources cognitives mobilisées (informations, théories, concepts, rapport au savoir, méthodes, techniques, procédures, habiletés, attitudes);

2. De l’autre côté, les schèmes opératoires qui permettent, en temps réel, la mobilisation efficace des ressources cognitives. Sans ces schèmes, les ressources ne sont pas activées, transférées, adaptées, coordonnées, bref, elles restent ‘lettre morte’.

S’il n’est pas possible d’enseigner directement des compétences, mais seulement créer les conditions de leur développement par l’entraînement, alors „la transposition de savoirs savants en savoirs scolaires – écrit Philippe Perrenoud – correspond bien à ce sens métaphorique: les savoirs changent partiellement de forme, voire de contenu, lorsqu’ils passent de leur domaine d’origine (la cité savante) à leur domaine de transmission (l’école).” [1]

La plus grande partie de nos connaissances se situent dans nos compétences inconscientes dans le développement desquelles le poids de l’expérience est considérable. Nos compétences inconscientes ne s’opposent pas aux connaissances académiques classiquement transmises par l’école et l’université, mais il existe un décalage parfois impressionnant entre ce qu’une personne peut faire en situation et ce qu’elle est capable d’en dire. Nos compétences inconscientes représentent la „la forme opératoire de la connaissance” [2], celle qui permet d’agir en situation.

Le souci de prendre davantage en compte le critère de la compétence est si fort aujourd’hui que les écoles elles mêmes essayent d’orienter leurs enseignements davantage vers la formation des compétences de leurs élèves.

La recherche didactique insiste sur l’idée que pour être enseignée, une discipline doit être rendue enseignable, accessible à des apprenants. Processus formalisé, tant pour la conception des programmes que pour la pratique de classe, par le concept de transposition didactique (TD).

La réussite de l’apprentissage dépend beaucoup de la qualité de la relation enseignant – apprenant. A part la transmission du savoir, l’enseignant a également ce rôle de donner confiance, conseiller, orienter, encourager, sécuriser l’élève pour que passe la communication et s’établisse la relation. L’enseignant doit pouvoir développer les compétences relationnelles adéquates: confiance, sécurité, empathie relationnelle etc. Pour établir une relation d’autorité éducative, la tâche de l’enseignant c’est d’exercer son influence pour permettre aux élèves d’être plus auteurs d’eux mêmes: plus autonomes, plus responsables, plus créatifs, plus motivés, plus efficaces.

L’autorité de l’enseignant de langues modernes est reconnue par les apprenants qui ont l’habitude d’identifier la langue à enseigner à la personne qui l’enseigne. C’est pourquoi, selon l’avis de Michel Boiron, la motivation à l’apprentissage de la langue, et au-delà, la motivation à être adulte vont dépendre étroitement du succès ou de l’échec de la relation enseignant(e)/apprenant(e)s. [3]

Le but principal de la recherche en didactique des langues étrangères est d’orienter l’enseignant vers la construction de situations dans lesquelles les élèves trouvent l’occasion de développer des formes d’organisation nouvelles de leur activité, d’en élargir la portée, moyennant l’enrichissement des „schèmes” qui désignent ces formes d’organisation. Les verbalisations des élèves et des enseignants, les formes institutionnalisées et académiques de la connaissance ne jouent pas un rôle négligeable dans les processus d’enseignement et d’apprentissage, mais c’est l’activité en situation (geste, attention sélective, raisonnement, gestion de l’incertitude…etc.) qui constitue le ressort principal du développement des compétences.

Loin d’être un simple praticien, voire un transmetteur, l’enseignant exerce une activité complexe. Le développement des compétences demande du temps.On ne finit jamais d’apprendre, justement parce qu’on apprend par l’expérience, et donc par la pratique. Mais l’expérience ne s’oppose pas à la formation initiale et à la formation continue qui permettent de donner un autre statut à l’expérience, et ouvrent aussi des possibilités de tirer un meilleur profit de l’expérience, car la formation est aussi une question de pratiques et de situations.

L’élève et l’enseignant ne se développent pas seuls, dans un face à face solitaire avec la situation à laquelle ils sont confrontés. L’élève peut s’appuyer sur l’enseignant, sur les autres élèves, sur sa famille. Quant à lui, l’enseignant peut s’appuyer sur ses collègues, avec lesquels il forme une certaine communauté pédagogique.

Les conséquences de cette attention particulière accordée à la pratique sont importantes pour la didactique. Dans l’enseignement, il est essentiel d’offrir aux élèves des situations qui les conduisent à construire de nouvelles formes d’activité, par des prises de conscience personnelles et avec l’aide de l’enseignant. Il est essentiel également d’analyser le professionnalisme des enseignants à partir de leur pratique, et pas seulement de leurs diplômes.

Dans son ouvrage Ecole et médiations, Annie Cardinet formalise ce que peut apporter la médiation en éducation, particulièrement en pédagogie. Elle distingue entre médiation interpersonnelle (visant la construction de solutions face à des conflits entre personnes ou groupes humains dans les domaines judiciaire, social, familial, professionnel) et médiation intra personnelle (visant le développement de l’enfant en tant qu’individu, la transmission culturelle, médiations utilisées en psychanalyse, psychologie, pédagogie). Suite à des recherches approfondies et grâce à son expérience due aux applications des travaux de Reuven Feurstein et de Yacov Rand à l’éducation, Annie Cardinet identifie les grandes fonctions de la médiation:

  • une fonction communicative;
  • une fonction éducative ;
  • une fonction de régulation sociale;
  • une fonction de transmission de valeurs;
  • une fonction de préparation à l’avenir.

Transférer des apprentissages c’est savoir utiliser dans un nouveau contexte des connaissances acquises précédemment. Très souvent, cette question est traitée dans l’enseignement comme un ‘allant de soi’. Comme si l’élève qui a appris à conjuguer des verbes dans sa langue maternellesera capable de  le faire dans toutes les langues étrangères et dans toutes les situations de communication. Autre fausse évidence: les élèves devraient être capables de transférer leurs connaissances d’une discipline à l’autre. Si l’on a appris les principes de la dissertation en français, on devrait être capable de disserter en histoire. Les recherches cognitivistes prouvent cependant qu’il n’en va pas ainsi. Tout un ensemble de stratégies cognitives interagissent dans le transfert:

  • accessibilité aux connaissances et aux compétences dans la mémoire à long terme,
  • évaluation de leur validité pour les mettre en correspondance avec la situation nouvelle,
  • adaptation des éléments qui ne se correspondent pas etc.

En conséquence, il n’existe pas de ‘compétence transversale’ in abstracto. Le transfert n’est possible que lorsqu’il est contextualisé. Il ne constitue pas, comme on le croit souvent, une ‘généralisation’, mais au contraire un ‘processus de particularisation’ qui sollicite un savoir spécifique pour effectuer une tâche.

Le concept d’auto médiation avance l’idée que l’apprenant peut devenir son propre médiateur dans l’accès au savoir. En favorisant les échanges et en appuyant ses médiations sur les interactions constructives entre pairs, l’enseignant médiateur facilite le franchissement des obstacles cognitifs, car il tient compte des besoins éducatifs de l’élève et sait inscrire ses médiations dans le cadre social de l’apprentissage à l’école. Il prend en compte l’idée que la construction d’un savoir n’est pas un acte exclusivement solitaire et que la mise en communauté des intelligences facilite la co-construction des savoirs. L’enseignant médiateur est donc un professionnel de l’enseignement capable de traduire des difficultés et des potentialités d’apprentissage en termes de besoins éducatifs d’ordre cognitif. L’enseignant médiateur a aussi un rôle régulateur car il assure la régulation permanente de son action médiatrice afin de donner à chaque élève l’occasion d’apprendre et de progresser.    

La clarté cognitive est une condition essentielle de la compréhension pour que les élèves sachent ce qu’ils sont en train de faire ici et maintenant et ce qu’on cherche à leur apprendre.

Les médiations cognitives et interpersonnelles sont celles qui permettent aux élèves de se montrer capables de se souvenir d’expériences passées ensemble pour anticiper l’avenir, organiser leurs activités actuelles et prévoir leurs activités futures.

Dans son ouvrage Freedom to Learn, Carl Rogersprésente les trois conditions nécessaires pour un apprentisage efficace: la relation empathique, la considération positive inconditionnelle et la congruence. Ces qualités font que tout en étant centré sur les besoins de l’élève, l’enseignant-médiateur est en même temps centré sur lui-même. Il y a ainsi une correspondance entre les deux visions et une harmonie entre les deux personnes. L’enseignant s’implique personnellement dans la relation pédagogique et se permet d’exprimer ses opinions, émotions et sentiments dans la mesure où ceux-ci sont favorables à l’expression et la croissance de l’élève. Parallèlement, celui-ci grandit dans sa prise de conscience de qui il est. Si l’enseignant veut authentiquement prêter attention au vécu immédiat de l’élève, assez paradoxalement, il sera amené à porter son attention sur lui-même, son vécu et sa propre personne et cela, en relation avec l’autre.

La médiation pédagogique, par ses origines, renvoie à la dimension sociale et culturelle de  l’intelligence qui se construit chez tout individu dans les interactions sociales et culturelles qu’il développe au cours de sa vie. La mémoire est alors au cœur de l’apprentissage et a un fonctionnement dynamique.

Une relation est vivante quand chacun, l’élève comme l’enseignant, ose demander, donner, recevoir et refuser. Dans son livre Psychothérapie. Méthodes et techniques, le docteur André Moreau de Belgique démontre que tout ce qu’on a découvert sur l’efficacité de la thérapie se passe égalementdans plusieurs domaines d’activité, y compris dans l’enseignementoù l’enseignant peut être assimilé au thérapeute et l’élève au client dans leurs qualités respectives pour que passe la communication et s’établisse la relation. La matière à enseigner peut être assimilée à la méthode thérapeutique. L’élève „placebo positif” ou accordeur progresse d’autant plus vite que l’enseignant est accordeur, „placebo positif”, convaincu et convainquant, passionné et donc passionnant.

En guise de conclusion, il faut admettre que la personnalité du professeur, sa façon de voir la vie et la discipline qu’il enseigne, sa facilité d’induire aux élèves le désir de s’identifier à lui, la relation qu’il établit, la dimension et l’envergure qu’il donne à la matière enseignée représentent un facteur important qui contribue à la réussite de l’apprentissage.

Bibliographie

Boiron, M, L’innovation en question(s), https://gerflint.fr/Base/Baltique3/Boiron.pdf 

Cardinet, A. (2000), „Ecole et médiations”, Editions Eres, p.160-163

Lebrun, M. (1999),  Institut de pédagogie universitaire et des multimédias, Université de Louvain-la-Neuve; autour de L’apprentissage par résolution de problèmes (ARP), L’apprentissage coopératif (AC) et La pédagogie du projet ou par le projet (PP);  http://lebrunremy.be/WordPress/  

Moreau, A. (2007), „Psihoterapie. Metode si tenici”, editura Trei, Bucuresti, p. 75 – 76; Traducere din limba franceză în limba română de prof. Virginia-Smărăndița Brăescu; http://www.edituratrei.ro/carte/andre-moreau-psihoterapie-metode-si-tehnici/2021/  

Perrenoud, Ph. (1998), „La transposition didactique à partir de pratiques: des savoirs aux compétences”, in „Revue des sciences de l’éducation” (Montréal), Vol. XXIV, n°3, pp. 487-514.

Vergnaud, G. (2001), „Forme opératoire et forme prédicative de la connaissance”, Conférence publiée dans les Actes du Colloque GDM-2001, Montreal; Disponible sur http://www.pedagopsy.eu 

Auteur: Prof. Virginia Braescu, Professeur de FLE

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Autor:

Teacher, Trainer, Speaker, Project manager, Business Owner

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